Mettre les données ouvertes au service des urbanistes : les enseignements tirés de Ratio.City
L'urbanisme est un puzzle complexe. Les données permettent d'assembler les pièces.
Qui je suis et pourquoi j'écris ceci
Je suis Jagrat, stagiaire en planification chez Ratio.City et étudiant en urbanisme en fin de cursus. Au cours des derniers mois, j'ai travaillé en étroite collaboration avec l'équipe chargée des données sur divers sujets, allant de l'audit des ensembles de données municipales à la vérification de la circulation des informations sur la plateforme. Cet article est une réflexion sur ce que j'ai appris en travaillant dans un environnement de planification numérique.
Qu'est-ce que l'Open Data et pourquoi les urbanistes s'y fient-ils ?
Les données ouvertes sont devenues l'un des mots à la mode de l'urbanisme moderne. Lorsque les gouvernements rendent leurs données accessibles au public, cela peut favoriser une prise de décision plus transparente, améliorer l'efficacité du travail et même susciter de nouvelles formes d'innovation civique et économique. Une définition des données ouvertes que j'apprécie particulièrement est celle donnée par la ville de Toronto: les données ouvertes sont des données numériques mises à la disposition de tous, à tout moment et en tout lieu, pour être librement utilisées, réutilisées et redistribuées. Les municipalités canadiennes ont pris cette idée à cœur, avec ESRI Canada indiquant que plus de 150 municipalités canadiennes disposent de portails de données ouvertes actifs. Les villes du Canada publient désormais tout, des plans de zonage aux projets de développement, au nom de la transparence et de la responsabilité.
Pourquoi les données ouvertes ne sont pas toujours exploitables (et comment Ratio.City peut aider)
Mais malgré tous ces progrès, un problème majeur reste caché à la vue de tous : l'accessibilité des données ne signifie pas toujours leur facilité d'utilisation. Une grande partie des données ouvertes sont encore dispersées sur plusieurs sites web municipaux, chacun avec des formats, des conventions de nommage et des calendriers de mise à jour différents. Autre constat important : même lorsque les données sont « ouvertes », elles ne sont pas toujours utilisables. Certaines municipalités publient leur zonage au format PDF, d'autres au format GeoJSON, d'autres encore sous forme de service WMS enfoui dans trois menus. Les conventions de nommage varient considérablement. Les cycles de mise à jour ne sont pas toujours clairs. Et pour les municipalités plus rurales, vous obtiendrez souvent plus de couches environnementales ou agricoles de la province que de la municipalité elle-même. C'est là qu'intervient Ratio.City. La plateforme rassemble les données ouvertes de différentes municipalités et les présente dans une interface cohérente et interactive que les urbanistes, les développeurs et même les utilisateurs non techniciens peuvent naviguer. Elle est particulièrement puissante pour les applications liées au logement et au développement, où il est essentiel de disposer d'informations actuelles et précises.
C'est là que Ratio.City crée une réelle valeur ajoutée :
il centralise les données dispersées
le normalise dans toutes les municipalités
corrige les incohérences
ajoute du contexte
et rend tout visuel et interactif
La plupart des urbanistes ne voient que le produit fini : une couche cartographique claire, une catégorie de zonage bien structurée, un modèle de masse qui se charge instantanément. Ce que je n'avais pas réalisé avant de commencer à travailler ici, c'est l'énorme travail invisible qui est nécessaire pour y parvenir.
Une grande partie de mon stage jusqu'à présent a consisté à effectuer un audit très complet de toutes les informations disponibles sur Ratio.City. Il s'agissait de vérifier les liens sources, de confirmer les cycles de mise à jour, de valider les API, de repérer les couches obsolètes et de signaler les ensembles de données qui nécessitaient des corrections manuelles. Et croyez-moi, l'audit des données représente beaucoup de travail. Même une tâche aussi simple que la confirmation des limites des parcelles peut se transformer en une véritable enquête si une municipalité a changé de portail, renommé des couches ou modifié des schémas de données. Parfois, les données étaient propres et faciles à intégrer dans la plateforme. D'autres fois, l'équipe devait intervenir manuellement pour nettoyer les données. L'un de mes exemples préférés vient d'une demande des développeurs : ils voulaient que les noms et les liens des conseillers municipaux apparaissent directement sur le profil d'une propriété, car cela facilitait la diligence raisonnable. Mais ces informations n'étaient disponibles nulle part dans un format prêt à l'emploi, ce qui signifiait que quelqu'un devait créer et maintenir manuellement cette couche dans ArcGIS. C'est le genre de travail fastidieux et peu glamour que personne ne remarque, mais qui fait gagner des heures aux planificateurs.
Plus je passais de temps sur la plateforme, plus je me rendais compte que la valeur de Ratio.City ne réside pas seulement dans les données, mais aussi dans leur interprétation. Elle transforme des informations fragmentées en informations exploitables par les urbanistes et les promoteurs immobiliers.
Au-delà de l'agrégation : là où la planification et les SIG se rencontrent
Ce qui est intéressant, c'est que la plateforme commence à résoudre un autre problème au-delà de l'agrégation de données. Conçue pour aider les promoteurs immobiliers et les urbanistes à communiquer entre eux, elle aide également deux autres groupes de personnes à communiquer. Une chose que j'ai entendue à maintes reprises chez Ratio.City, c'est que les urbanistes et les spécialistes des SIG « ne parlent pas toujours le même langage ». Les urbanistes savent généralement « ce » qu'ils veulent découvrir, mais pas toujours « comment » travailler avec les données ouvertes. Les experts SIG comprennent l'aspect technique, mais ne sont pas toujours impliqués dans les décisions quotidiennes en matière d'urbanisme. Il en résulte donc un fossé. Mais en centralisant les données et en rendant leur exploration intuitive, Ratio.City a fini par favoriser la discussion. C'est un heureux hasard. Plus d'une personne l'a qualifié en plaisantant (ou pas vraiment) de « SIG pour les non-utilisateurs du SIG », et après mon séjour ici, je comprends tout à fait pourquoi.
Un moment très instructif a été ma conversation avec Sibeal McCourt, responsable des données chez Ratio.City, qui a travaillé dans la planification, les SIG et le développement de produits numériques. Notre conversation m'a aidé à consolider ce que je commençais à comprendre, à savoir que les données ouvertes ne sont puissantes que lorsque quelqu'un les rend interprétables. Elle m'a expliqué que les urbanistes connaissent souvent leurs objectifs, qui peuvent impliquer de tester la faisabilité d'un projet, de comprendre les contraintes et d'évaluer les parcelles, mais qu'ils n'ont pas toujours les compétences techniques nécessaires pour traiter les données brutes. Parallèlement, les équipes SIG ne sont pas toujours impliquées dans la prise de décision. Ratio.City est devenu, presque involontairement, un espace intermédiaire où ces deux mondes se rencontrent.
Sibeal m'a également rappelé que derrière chaque interface claire se cache un travail considérable de contrôle qualité. Des données erronées peuvent avoir des conséquences réelles, non seulement pour l'analyse, mais aussi pour des domaines tels que les services d'urgence et la sécurité publique. En observant le processus de l'équipe, j'ai pris conscience de l'importance de la précision d'une manière que je n'avais jamais envisagée auparavant.
Son argument le plus important, celui qui m'a vraiment marqué, est que la planification devient un domaine hybride. Les urbanistes n'ont pas besoin de devenir des experts en SIG, mais ils ont besoin d'outils qui les aident à comprendre les informations spatiales en toute confiance. Ratio.City n'a pas pour but d'enseigner aux urbanistes des processus techniques. Il s'agit plutôt d'un outil SIG facile à utiliser qui met des informations spatiales directement à la disposition des urbanistes qui n'ont peut-être pas le temps ou la formation nécessaires pour utiliser des logiciels complexes. Il réduit les obstacles techniques afin que les urbanistes puissent se concentrer sur les questions de planification proprement dites plutôt que de se débattre avec le traitement des données. Cette idée d'un langage commun est quelque chose que je garderai à l'esprit longtemps après ce stage.
Ce que cette expérience m'a appris sur les données ouvertes
Passer du temps sur Ratio.City m'a permis de comprendre une chose : les données ouvertes ne prennent toute leur valeur que lorsqu'elles sont transformées en quelque chose que les gens peuvent réellement utiliser.
Mais l'accessibilité n'est pas seulement un problème technique, c'est aussi un problème de conception. Lors de ma conversation avec Sibeal, elle a souligné que les urbanistes ne recherchent pas seulement des données brutes. Ils recherchent du sens. Ce fossé n'est pas comblé par la quantité d'informations, mais par une conception réfléchie, une interprétation et une collaboration avec les utilisateurs. Cela a des implications plus larges pour le domaine de l'urbanisme. À mesure que les villes évoluent vers des modèles de « villes intelligentes » et des formes plus approfondies de gouvernance numérique, la maîtrise des données devient fondamentale. Des flux de travail transparents, une cohérence intercommunale et des outils accessibles ne soutiennent pas seulement la prise de décision professionnelle, mais renforcent également l'engagement civique et la confiance du public. Les données ouvertes doivent servir à la fois l'intérêt public et les besoins pratiques des personnes qui façonnent la ville au quotidien.
Si je devais retenir une chose de mon expérience, ce serait que la puissance des données ouvertes réside dans la manière dont elles sont traduites : des ensembles de données propres, des interfaces claires et des relations collaboratives sont tous des éléments importants. Ratio.City se situe à la croisée de ces éléments. Et alors que les villes canadiennes continuent d'investir dans des écosystèmes de données ouvertes, des plateformes telles que Ratio.City ont le potentiel de contribuer à l'instauration d'une culture de planification plus connectée, plus transparente et davantage axée sur les données, où l'information n'est pas seulement présente, mais véritablement utile.
